Cet article est un résumé de ma publication dans le International Journal of Innovation and Learning. Je l’ai fait en tant que professionnel de recherche à l’Université TÉLUQ pour le projet Creating Digital Opportunity.
J’ai analysé le secteur du multimédia et TI à Montréal avec une trentaine d’entrevues provenant de différents types d’organisations.
- firmes en démarrage,
- PME,
- Grandes firmes,
- Association d’affaires,
- incubateurs,
- centres de recherche,
- consultants,
- gestionnaires du parapublic.
D’abord, qu’est-ce que la fertilisation croisée de l’innovation ?
C’est le transfert d’une idée d’un secteur à un autre secteur. C’est devenu une des plus importantes sources d’innovation pour les firmes. Dans des secteurs ou des grappes industrielles, il y a des réseaux qui permettent d’encourager la coopération entre laboratoires, centres de recherche, universités, CCTT (CEGEP), et autres.
Cela permet d’explorer de nouveaux domaines d’innovation. En plus, de mieux maîtriser les risques du développement de produits, pour pénétrer dans de nouveaux marchés.


Le secteur du multimédia-TI à Montréal est propice à la fertilisation croisée. Grâce à la collaboration de plusieurs secteurs comme TI, jeux vidéo, réalité augmentée, réalité virtuelle.
Certaines organisations créent beaucoup de valeur avec cette stratégie. Par exemple, Ubisoft qui a plusieurs initiatives en fertilisation croisée de l’innovation. Pensons à des centres de recherche, trois chaires de recherche en intelligence artificielle, en développement de jeux vidéo dans les universités et les CÉGEPS.
Montréal est une plaque tournante en développement de jeux vidéo.
Montréal est la quatrième agglomération au monde dans les jeux vidéo. La ville possède des quartiers axés sur l’entrepreneuriat et la technologie comme le Mile-End et Griffintown.
Les organisations utilisent des stratégies de fertilisation croisée de l’innovation comme le co-développement avec des clients et des fournisseurs. Il y a aussi le co-développement avec des experts, des universités ou CCTT. De plus, ils assistent à des conférences, des événements de réseautage, et forme de la coopétition (coopération avec des compétiteurs). Pour finir, ils utilisent l’achat de l’innovation (ex. brevets, acquisition d’entreprise), des projets sociaux, des co-entreprises.
Le CRIM est un centre de recherche en informatique de Montréal qui a plusieurs projets de fertilisation croisée de l’innovation.
Son PDG Françoys Labonté disait ceci :
« Si nous comparons le Québec avec l’Europe ou même la Silicon Valley, nous avons la mentalité que « Les entrepreneurs feront tout eux-mêmes. Externaliser des projets et obtenir toute l’expertise de sources externes se produit très souvent parmi les PME ou les firmes en démarrage.
D’autre part, si nous prenons l’exemple de la Silicon Valley (avec un peu d’exagération), un entrepreneur dirait : « J’ai une vision, voici ce que je veux faire, je veux devenir grand comme ça, faire ce qui est nécessaire pour cela, amener 3 ou 4 partenaires et partager la part du marché… et la taille de la part serait beaucoup plus grande…
Ici au Québec, c’est plutôt : « J’ai une idée, je vais tout faire moi-même, nous allons essayer beaucoup de choses en interne et nous aurons une petite part de marché. Habituellement, les petites entreprises perdront beaucoup de temps et perdront de l’expertise. En plus, dans tout l’écosystème, nous avons un peu de capital-risque, qui finance les PME de manière très limitée.
Les incitations à externaliser des projets sont au cœur de notre modèle économique (au CRIM).
Les entreprises nous donnent des contrats de recherche et développement, mais il doit être dans leur culture de partager leurs vrais problèmes. Parce qu’elles ne peuvent pas résoudre toutes seules. Ce n’est pas un processus naturel pour plusieurs entreprises. Cela peut être un obstacle à l’innovation. Nous essayons d’anticiper qu’elle sera la demande pour les nouveaux produits et technologies dans les trois prochaines années. »
Si on retrouve plus souvent des grandes firmes qui ont la capacité de faire plus de projets de fertilisation croisée, les PME qui l’adoptent peuvent créer de la valeur et devenir une firme de taille moyenne en forte croissance comme Moment Factory, Workleap ou Turbulent Media.
Certaines PME peuvent avoir peur de se faire voler des idées, des marchés ou des employés en collaborant avec de plus grandes firmes. Si certains ont peur, d’autres l’ont adopté et sont devenus des firmes moyennes de forte croissance.
Par ailleurs, les entrepreneurs ne devraient pas réinventer la roue et se réapproprier des technologies du domaine public. En effet plusieurs innovations commerciales sont un mix de connaissance du domaine public et privé.
L’innovation ouverte (innover avec des sources externes) et la fertilisation croisée de l’innovation peuvent améliorer de façon notable la compétitivité des firmes.


De nombreuses opportunités de fertilisation croisée résident dans la collaboration entre les PME. Sans oublier les entreprises de taille moyenne et les grandes entreprises.
Les autres partenaires sont :
- le monde académique,
- les centres de recherche,
- le co-développement avec les clients,
- le co-développement avec les fournisseurs.
Les entretiens de notre étude révèlent que les entreprises qui ont internalisé l’apprentissage grâce à ces nouveaux partenariats ont pu renforcer ou créer des avantages concurrentiels.
Nos résultats montrent que les entreprises de taille moyenne et les grandes entreprises utilisent un large éventail de méthodes de fertilisation croisée pour l’innovation. Les firmes en démarrage et les petites entreprises ont une exposition plus limitée aux opportunités de fertilisation croisée pour favoriser l’innovation.
Cependant, certaines petites entreprises ont utilisé des méthodes de fertilisation croisée pour l’innovation avec un grand succès dans leur création de valeur. Par exemple, le co-développement avec les clients qui participent à plusieurs conférences à travers le monde. Ce sont des derniers apparaissent souvent dans nos résultats de l’étude présentés ci-dessus. Cela devient une excellente source d’échange de connaissances et de fertilisation croisée pour les entreprises multimédia et TI en forte croissance.
Cela est aussi vrai pour plusieurs autres secteurs : comme l’aérospatiale, le manufacturier, etc.
Source :
Cross-fertilisation for innovation and collaboration in the Quebec multimedia-IT ecosystem
L Rhéaume, DG Tremblay, International Journal of Innovation and Learning 22 (4),pages 458-479, (2017)