C’est l’initiative que prennent certains employeurs pour permettre à leurs collaborateurs de passer une courte période à travailler de n’importe où dans le monde. Les tracances sont (de là la contraction des mots « travail » et « vacances »). Ce nouveau mot est de plus en plus employé dans les milieux du travail. C’est le télétravail en dehors des cadres habituels.
Les tracanciers, eux, font le choix de travailler sur leur lieu de vacances
Cela va beaucoup plus loin que de prendre simplement leurs courriels et de répondre aux urgences. C’est une nouvelle forme de télétravail !
J’ai mis la main sur une étude menée l’an dernier auprès de 1 000 personnes de la société de réservation de vacances Kayak. Elle estime que 27 % des Canadiens employés et 38 % des travailleurs de la génération Z – âgés de 18 à 24 ans – auront pris des tracances en 2022.
Bien entendu, ce ne sont pas tous les types d’emploi qui permettent une telle organisation du travail. Mais il faut reconnaître qu’il s’agit d’une belle façon de retenir les talents dans les entreprises. De plus, cela aide à conserver un sain équilibre entre le travail et la vie personnelle, lorsque cela s’avère possible.
Modalités et conseils pour les employeurs ouvert aux tracances
Les entreprises qui offrent un programme de tracances encadrent généralement la prestation de travail à distance dans une politique.
L’encadrement peut prévoir toutes les modalités comme pour le télétravail.
- Les horaires,
- Les heures supplémentaires,
- Ainsi que les périodes auxquelles on s’attend à ce que la personne soit disponible,
- Le matériel fourni,
- La cybersécurité,
- La protection des données, etc.
Le tracancier doit donc s’acquitter de toutes ses responsabilités professionnelles conformément aux attentes de son employeur. La destination choisie doit offrir toutes les commodités pour effectuer le travail efficacement. Notamment, avoir accès à une bonne connexion Internet.
Les séjours de quelques semaines ne posent pas de problèmes particuliers. Il est, par contre, important, tant pour le tracancier que pour l’employeur, de se renseigner avant le départ sur les lois du travail et fiscales locales. Surtout ceux qui pourraient entrer en vigueur en fonction de la longueur du séjour.
Par exemple, lors de longs séjours, il y a davantage de chances que le lien fiscal entre le tracancier et le Canada soit rompu. Cela peut entraîner différentes contraintes tant pour le tracancier que l’employeur.
Aussi, tant que le tracancier garde un domicile ou une résidence au Québec et qu’il quitte temporairement la province pour faire du télétravail, la Loi sur les normes du travail va généralement continuer de s’appliquer. C’est la même chose pour la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, à condition que la durée du travail hors du Québec n’excède pas cinq ans au moment où l’accident est survenu ou la maladie a été contractée et à condition que l’employé ait été affecté en télétravail hors du Québec à la demande de l’employeur. Par ailleurs, le régime d’assurance collective pourrait cesser de couvrir le tracancier à l’extérieur de la province.
Au-delà d’être « cool » et de susciter l’envie…
Les deux ou trois semaines de vacances traditionnelles estivales limitent les choix de destinations. Tandis que les tracances offrent de nouvelles possibilités d’évasion.
Elles permettent de partir plus loin et/ou plus longtemps tout en respectant les obligations professionnelles. Outre les vacances, les tracances permettent également aux collaborateurs de visiter de la famille à l’étranger. Comme de participer à des événements familiaux ou encore de prendre soin de proches qui ne résident pas avec eux.
Pour l’organisation, non seulement, les tracances peuvent s’avérer intéressantes pour attirer et fidéliser les talents, mais constituent également une mesure pertinente visant la diversité et l’inclusion dans un monde du travail où l’apport des personnes immigrantes est plus que bienvenu.
De plus, certaines entreprises constatent que leurs collaborateurs sont plus créatifs et innovants, lorsqu’ils sortent de leur routine.
En revanche, il peut s’avérer difficile pour certaines personnes de travailler en mode vacances. Les distractions sont nombreuses et le lieu de travail peut s’avérer plus ou moins bien adapté. Les tracances peuvent aussi se compliquer lorsque le décalage horaire entre le lieu de tracances et le lieu de travail est trop grand. Il s’agit d’une dimension à prendre en compte lors du choix de la destination. Comme dans le cas du télétravail, l’équilibre entre la vie personnelle et professionnelle peut aussi devenir un enjeu pour les tracanciers.
Les organisations, quant à elles, doivent mettre en place un programme et des politiques claires et repenser la cybersécurité et la protection des données, puisque mal géré, le cadre des tracances peut augmenter considérablement les risques d’espionnage industriel et de cyberattaque.
Bref, les tracances ont de quoi séduire, mais exigent de la rigueur et une bonne préparation tant du côté du tracancier que de l’organisation afin d’éviter les mauvaises surprises. Comme toute nouvelle tendance, les tracances suscitent un questionnement tout à fait légitime, mais plutôt que de simplement dire non, pourquoi ne pas faire en sorte de rendre cela possible ?