De quoi a-t-elle peur ?
Estelle est propriétaire depuis 25 ans d’une entreprise qui fabrique des pièces de rechange spécialisées. L’entreprise a progressé lentement et sûrement. Il y a six ans, son neveu Aimeric est entré dans l’entreprise, et depuis, le chiffre d’affaires a quadruplé.
Formé en marketing, Aimeric a introduit de nouvelles idées qui ont donné des résultats, on a lancé de nouveaux produits, trouvé de nouveaux clients et augmenté la productivité. Estelle pense à la relève et nul doute qu’Aimeric serait un candidat sérieux pour lui succéder… Mais elle doute, n’est pas prête à se décider et se demande pourquoi.
Le repreneur d’entreprise doit-ils penser pareil que le fondateur?
Lors de son premier coaching, après avoir expliqué la situation et ses hésitations, je lui ai posé la question : « De quoi as-tu peur ? » Elle n’a pas répondu directement, m’expliquant plutôt l’historique de l’entreprise, l’idée originale et la manière de la diriger, en somme, sa philosophie d’affaires, ses valeurs et la culture entrepreneuriale.
- Et quelles sont les valeurs et la philosophie d’Aimeric ?
- Aimeric est axé sur les résultats, il a plein d’idées et sait comment les réaliser.
- Est-ce contradictoire ?
- Non, mais moi, je n’ai pas créé cette entreprise pour faire de l’argent, même si j’en fais et que j’aime ça. Lui met l’argent comme une priorité.
- Et tu n’aimes pas ça ?
- Oui, mais il y a autre chose, lorsqu’on parle vision d’entreprise, il sort l’idée de pouvoir la vendre pour 16 millions de dollars.
- Toi, tu penses quoi ?
- Que j’ai bâti cette entreprise depuis 25 ans pour me réaliser, pas pour la vendre à des Américains qui prendraient les clients et produiraient aux États-Unis ou en Indonésie et fermeraient nos installations.
- Si ça arrivait, comment te sentirais-tu ?
- Je serais riche… Mais c’est comme si… je laissais un travail pas terminé…
- Pour toi, la pérennité de l’entreprise est plus importante ?
- Oui, c’est ça.
- As-tu parlé de ça avec Aimeric ?
- Non, mais c’est ce que je devrais faire, peut-être que les points seront compris.
- As-tu moins peur ?
- Oui, je sais ce que je vais faire.
Si la vision, la mission et les valeurs du repreneur et du fondateur ne sont pas compatibles, on se dirige vers des conflits et un échec à long terme. Il faut communiquer davantage sur ces aspects complexes que sur les conditions matérielles.