« Jane[1] ne sait plus quoi faire : embauchée de prime abord comme bibliothécaire dans une école secondaire privée, elle se retrouve du jour au lendemain à travailler en tant que surveillante d’élèves. L’absence de gestion et de décision de son superviseur amène un grave problème dans l’équipe : un jeu de pouvoir entre les surveillantes à savoir qui va gérer Jane.
Chacune lui donne des ordres, au point où celle-ci se rend compte que seule la surveillante en chef doit prendre en charge ses tâches. En refusant de se plier aux caprices de ses collègues, Jane se fait ignorer, insulter et ridiculiser. Depuis près d’un mois, on ne la salue plus, et elle préfère dîner dans les toilettes pour éviter les regards mesquins à son endroit. »
Histoire invraisemblable ? Malheureusement non, j’ai eu cette conversation lors d’une sortie entre amies. Jane démontrait des signes de détresse, ne sachant plus vers qui se tourner. Après l’avoir écoutée, je l’ai informée qu’elle subissait clairement une forme de harcèlement psychologique. Elle est restée bouche bée et m’a répondu que c’était la première fois que quelqu’un apposait un terme à son problème. Je n’en ai pas été surprise.
La Loi sur les normes du travail au Québec décrit le harcèlement psychologique ainsi :
« Le harcèlement psychologique au travail est une conduite vexatoire qui se manifeste par des comportements, des paroles ou des gestes répétés :
- qui sont hostiles ou non désirés
- qui portent atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique du salarié
- qui rendent le milieu de travail néfaste »
Que veut dire « vexatoire » ? Eh bien, c’est aussi simple qu’ignorer un employé volontairement en ne lui envoyant pas un simple « bonjour ». De perdre patience avec son commis de bureau en lui rappelant constamment ses erreurs. En remettant intentionnellement le travail à quelqu’un d’autre au lieu de la personne responsable du dossier.
En blasphémant devant les équipes de travail et en criant qu’ils ne font que des « stupidités ». Se moquer d’un collègue. Rétrograder une personne sans justification. Tout comportement indésirable contribuant à une pression négative sur l’atmosphère de travail. Mais quelles sont les obligations de l’employeur dans ces circonstances ? Il est responsable.
Les normes du travail sont claires :
« L’employeur est obligé de fournir à ses salariés un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique. »
En d’autres mots, l’employeur est entièrement responsable des comportements offensifs des intimidateurs dans son organisation. S’il n’intervient pas, immanquablement, il sera imputé de tout esclandre causé par le harcèlement psychologique. Les coûts peuvent être exorbitants : une année de salaire ou dommages et intérêts. Comment éviter la catastrophe ? Par la prévention.
Tout en informant les employeurs, les normes du travail obligent les entreprises à intégrer dès le 1er janvier 2019 :
« Une politique de prévention du harcèlement psychologique et de traitement des plaintes, incluant un volet concernant les conduites qui se manifestent par des paroles, actes ou gestes à caractère sexuel. »
Donc, les critiques négatives récurrentes, les moqueries sur l’apparence, le refus de collaborer à cause d’un motif discriminatoire de la Charte des droits et libertés, les attouchements sur une personne sans consentement, tout élément qui peut attaquer la dignité et l’intégrité d’une personne, seront au compte de l’entreprise. Cela suscite de la réflexion sur le sujet… Et si on commençait par de simples gestes positifs ? Pourquoi pas !
Un « bonjour » quotidiennement, un « s.v.p. » et « Merci de ton aide! » feront la différence dans nos approches en entreprise. Reconnaître le talent et ajouter une touche de respect ne feront qu’améliorer les relations.
Être plus alerte aux comportements négatifs et discipliner ceux qui manquent de civisme en milieu de travail. L’injustice existera toujours, mais si l’employeur s’efforce de faire une différence par son attitude et ses actions, le climat sera sûrement plus agréable à long terme.
[1] Prénom fictif