Entrevue réalisée avec Marie-Chantal Lamothe alors qu’elle était vice-présidente des Ressources humaines à la Banque Laurentienne, une institution financière fondée en 1846 et dont l’effectif atteint environ 4 200 employés.
La Banque Laurentienne figure parmi les 10 lauréats nationaux du programme Promoteurs de passion du Canada et s’est classée parmi les gagnants du concours Les 10 cultures d’entreprise les plus admirées au Canada, pour le Québec et le Canada atlantique.
Qu’est-ce qu’un employeur de choix?
C’est un employeur qui est en mesure d’attirer, de mobiliser et de retenir les meilleurs talents par la mise en place de programmes et d’initiatives venant répondre à leurs besoins. Pour ce faire, l’employeur doit être près du terrain afin de bien comprendre les enjeux de tous ses employés, peu importe leur champ d’action. Par ailleurs, les programmes de ressources humaines mis en place doivent être bien adaptés et simples pour que les gestionnaires se les approprient facilement, tout comme leurs employés.
Comment devient-on un employeur de choix?
La première chose à faire consiste à mesurer la perception de ses employés et gestionnaires avec un sondage auprès des employés. Ensuite, il faut présenter les résultats à l’ensemble du personnel, et surtout passer à l’action. Afin de s’assurer de l’engagement de nos gestionnaires dans l’initiative, chacun est responsable de mettre en place un comité, d’implanter un plan d’action et d’en assurer le suivi. Chaque comité animé par une personne des ressources humaines est composé d’employés positifs, constructifs, ayant un esprit ouvert et qui sont intéressés par l’optimisation des processus et l’amélioration de leur environnement de travail.
On vise une diversité d’employés selon les problématiques : des anciens, des nouveaux, des syndiqués, des cadres, etc. Tous les membres du comité suivent d’abord une journée de formation en résolution de problèmes donnée par l’Académie Banque Laurentienne. La deuxième journée, le groupe sélectionne un levier qu’il désire améliorer : la reconnaissance, la progression de carrière, etc. Le comité dispose ensuite de cinq sessions de travail pour discuter et établir un plan d’action concret qui sera présenté à la direction du service.
Évidemment, cette stratégie est adaptée à notre situation comme entreprise, mais, peu importe la taille d’une entreprise, l’important, si l’on désire devenir un employeur de choix, est de régler efficacement les irritants en engageant de façon constructive les employés dans la démarche. Pour ce faire, il faut d’abord bien cerner la problématique : définition, étendue, inclusions et exclusions, conséquences, causes, etc. Ensuite, il faut responsabiliser les gens dans la mise en application des solutions.
Le gestionnaire peut mettre en place la méthodologie et minimiser les obstacles, mais ce sont les employés qui sont les mieux placés pour trouver des solutions concrètes et réalistes. Toutefois, il serait utopique de croire que l’on peut tout régler. Il faut procéder étape par étape et surtout garder informés les employés de la progression de notre démarche.
Un autre aspect important à considérer pour devenir un employeur de choix est le recrutement. Combien d’entreprises sont prêtes à faire trop souvent des compromis lors du recrutement juste pour pourvoir un poste ! Souvent, les gestionnaires ne prennent pas le temps de bien dresser le profil du candidat recherché. On ne peut pas devenir un employeur de choix si on n’a pas des employés de choix.
L’adéquation des candidats avec la culture corporative et les valeurs organisationnelles est essentielle, d’où l’importance de s’assurer que ce qui est affiché sur le site Web corporatif et ce qui est dit lors de l’entrevue sont un juste reflet de la réalité. De notre côté, nous avons défini notre marque employeur, afin de déterminer notre ADN en tant qu’employeur, ce qui nous distingue et nous démarque chez nos employés et que nous cherchons à identifier dans nos processus de sélection.
Comment recrutez-vous?
Depuis trois ans, nous avons une équipe exclusivement affectée au recrutement, puisque l’acquisition de talents est devenue une véritable spécialité. Avant, nous attendions les curriculum vitae alors qu’il faut maintenant faire du recrutement proactif, mieux faire connaître nos possibilités de carrière et « vendre » l’expérience du travail à la Banque.
Nous possédons une page Facebook officielle axée sur le recrutement, de même qu’un profil corporatif Linkedln, et nous faisons parfois appel aux réseaux sociaux de nos gestionnaires pour des postes plus spécialisés. Cette visibilité sur les médias sociaux contribue à générer du trafic sur notre site carrière qui est au cœur de nos stratégies d’acquisition des talents, car il contribue concrètement à mieux faire connaître les occasions de carrière à la Banque.
Nous avons également mis en place des programmes de référencement avec primes de l’ordre de 500 $ à 5 000 $, selon les postes et la rareté des candidats. Pour maximiser le nombre de candidatures, nous prenons le temps de bien expliquer à nos employés la nature des postes à combler, surtout pour les postes moins connus.
Nous savons, par expérience, que lorsqu’un candidat est recommandé par un de nos employés, les chances de succès sont plus que doublées. En effet, personne n’a envie de nuire à sa réputation au sein de l’entreprise en recommandant une personne qui n’a pas un profil compatible avec notre culture corporative.
En 2011, nous avons inauguré notre « Station Carrière » à la station de métro Berri-UQAM à Montréal afin d‘accueillir les chercheurs d’emplois cinq jours par semaine pour des candidatures spontanées. Durant les 9 premiers mois, nous avons accueilli près de 7 000 candidats. Tous ces gens ont obtenu une entrevue sur-le-champ, uniquement en se présentant sur place. Plus de 200 employés ont été embauchés par la Station depuis son ouverture.
Comment mobiliser davantage au quotidien?
Un des principaux piliers de mobilisation est la communication. Le président de la Banque tient une tournée annuelle de toutes les régions pour répondre aux questions. De plus, 10 fois par année, le premier vice-président exécutif tient un déjeuner informel de 90 minutes avec les employés de différents secteurs afin d’échanger sur leurs défis et enjeux. Nous formons des groupes homogènes qui partagent les mêmes réalités.
D’abord, on parle brièvement de l’économie et des enjeux de la Banque, puis il lance la discussion par une question : « Qu’est-ce que la Banque peut faire pour enlever les irritants afin de rendre votre travail plus simple et pour que vous soyez plus efficaces? » Un compte rendu est rédigé par les ressources humaines puis acheminé aux différentes équipes corporatives et un suivi est effectué.
Nous tenons une rencontre de direction tous les vendredis de laquelle découlent des rencontres hebdomadaires des différents vice-présidents avec leurs équipes. Les gestionnaires sur le terrain, quant à eux, tiennent habituellement une rencontre éclair de 10 minutes chaque matin pour présenter les résultats et les promotions en cours, célébrer les succès et motiver les troupes pour la journée de travail.
Ces rencontres, de même que les rencontres hebdomadaires de chacun des gestionnaires avec leurs employés permettent de garder et mobiliser chaque employé en répondant à ses questions, en clarifiant les attentes, en reconnaissant les bons coups et en offrant du coaching à l’employé pour lui permettre de se développer.
Un deuxième pilier de mobilisation est la revue de performance. Que l’on fasse partie d’une grande organisation ou d’une petite entreprise, chacun veut avoir une rétroaction sur son rendement au travail. Deux fois par année, nous rassemblons tous les gestionnaires d’une même équipe pour dresser le bilan de chaque employé : réalisations, points forts, possibilités d’amélioration… Les gestionnaires s’entendent alors sur la cote d’évaluation à donner, ce qui a un impact direct sur la rémunération des employés.
On invite également chaque employé à faire sa propre auto-évaluation deux fois par année, puis son gestionnaire le rencontre pour discuter de son développement professionnel. Ce processus demande évidemment du temps, mais il nous permet surtout d’en sauver beaucoup. C’est un investissement, une occasion de réaffirmer les messages importants pour les six prochains mois. Par ailleurs, une évaluation de rendement ne devrait jamais être une surprise. En pareil cas, c’est que le gestionnaire n’a pas suffisamment donné de rétroaction de façon continue.
Un autre pilier de mobilisation : la reconnaissance. En plus d’un programme corporatif pour l’ensemble de la Banque et de différents concours pour la force de vente à grande échelle, nous organisons chaque année le Mois des employés extraordinaires. Chaque département dispose d’un budget préétabli par personne pour organiser une activité de groupe de son choix permettant de reconnaître les efforts de l’équipe.
Ces activités peuvent prendre différentes formes : chasse au trésor, rallye, BBQ, quilles, visite guidée… Dans le cas de mon équipe, ce n’est pas moi qui décide. Je fournis des balises en laissant les gens choisir en groupe. Je considère important d’écouter les employés, mais aussi de leur laisser de la latitude. Je les aide et je les encadre, mais ce sont eux qui font le travail.
Qu’est-ce qui fait de la Banque Laurentienne un employeur de choix?
Un premier élément qui démarque la Banque et qui en fait un employeur de choix est que nous attachons beaucoup d’importance à l’intégration des nouveaux employés et au développement en général de l’ensemble de nos employés et gestionnaires. C’est pourquoi nous avons fondé en 2008 l’Académie Banque Laurentienne. Ce concept innovateur vise à faciliter l’intégration des nouveaux employés dans leur environnement de travail et à accroître leurs compétences. Pour ce faire, elle fournit aux employés les connaissances et les outils requis pour bien exercer leurs activités professionnelles et ainsi adhérer plus facilement à la culture de la Banque.
D’abord, chaque nouvel employé a une session d’intégration « Bienvenue à la BLC » qui explique les grandes orientations de la Banque, animée en partie par le président. Puis différents programmes, d’une durée de deux semaines à six mois selon le rôle que l’employé est amené à jouer au sein de l’organisation, ont été développés en fonction du type de poste occupé. En plus de la formation en classe, plusieurs de ces programmes incluent une période de jumelage avec un parrain ou une marraine sur le terrain.
L’Académie Banque Laurentienne offre aussi des programmes de développement du leadership par le biais d’ateliers pratiques pour tous nos gestionnaires favorisant le partage de pratiques et l’apprentissage par le biais de modèles de gestion. Par ailleurs, tout au long de leur cheminement de carrière à la Banque, nos employés et gestionnaires auront accès à des activités et des programmes de formation leur permettant de faire évoluer leurs compétences.
L’Académie en ligne offre également de nombreuses capsules de formation à distance chaque année à plus de 4 200 employés souhaitant améliorer leurs connaissances techniques des produits et services ainsi que leurs compétences.
Un deuxième élément qui fait de la Banque un employeur de choix est que nous accordons une grande importance au cheminement de carrière de nos employés. Nous possédons notamment un programme de relève en gestion visant à former de futurs gestionnaires. Grâce à une approche de formation en milieu de travail, le programme accompagne les employés et leur permet d’occuper différents postes dans notre réseau de succursales pour possiblement évoluer vers un poste de gestion.
Finalement, la proximité entre la Direction et les employés est aussi un élément distinctif de la Banque. Rencontres et communications régulières, de même que mise en valeur de la contribution de chacun des employés contribuent à cette réalité.